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Armand Amougou, Publicitaire, expose les violations et abus au sujet des redevances publicitaires et de la régulation au Cameroun

Ces derniers jours, les régisseurs exerçant à Douala ont perdu le sommeil et sont remontés contre le Maire de la ville éponyme suite aux exactions orchestrées par Quantum A&A Sarl, une entreprise qu’il a mandatée pour recouvrer les taxes et les redevances sur l’achat d’espaces publicitaires auprès des annonceurs via leurs régies publicitaires.

Face au refus catégorique de payer des sommes jugées exorbitantes à un « régulateur illégal qui a bénéficié d’un passe-droit du Maire de la Ville de Douala », ces afficheurs comptent faire bloc pour ne plus subir des extorsions de fonds et autres abus (destruction de panneaux, pose de scellés sur les bureaux) comme c’est le cas actuellement. Cette situation somme toute cocasse vient remettre au goût du jour la problématique d’une part du paiement par les régies de publicité des taxes et redevances sur l’achat d’espaces publicitaires et d’autre part de la régulation et du contrôle des activités publicitaires.

Disons-le tout de go, pour la petite histoire, durant des années, les régisseurs aussi bien de Douala, Yaoundé qui s’est aussi attachée les services de Label, un opérateur privé, comme « régulateur » que d’autres villes du pays comme Nkongsamba, Bertoua ou encore Garoua payaient les taxes et redevances sur l’achat d’espaces publicitaires en s’appuyant sur la loi N°2006/018 du 29 décembre 2006 régissant la publicité au Cameroun en son article 20, alinéa 1, qui stipule clairement que « tout affichage publicitaire […] donne lieu au paiement des taxes et des redevances sur l'achat d'espaces publicitaires », sans aucune autre précision. Pour un 120x160 à Yaoundé par exemple, la redevance s’élevait à 3 500Fcfa/m²/mois. Pour un 4x3 tout comme pour un 6x3, elle était de 25 000 Fcfa/m²/an. La taxe municipale, quant à elle, était fixée à 1 500 Fcfa/m²/an et le droit d’occupation voirie à 500 Fcfa/m²/face/mois. Pour une banderole, chaque régisseur payait une redevance publicitaire de 25 000 Fcfa/face/semaine et un droit d’occupation voirie dont le montant était de 5 000 Fcfa/face/semaine. Le tout hormis la taxe sur la valeur ajoutée (19,25%) et le droit de timbre publicitaire (2%). La même facturation était tout aussi imposable aux afficheurs de Douala qui d’ailleurs s’acquittaient en ces temps-là de ces frais sans sourciller même si cela se faisait en toute illégalité pour ce qui était des redevances publicitaires dont les modalités de prélèvement ne sont pas jusqu’ici fixées par un texte législatif contrairement à la taxe sur la publicité. C’était une sorte de gentleman’s agreement où chaque partie trouvait son compte. Les relations entre les régisseurs et les Communautés urbaines de Yaoundé et Douala étaient alors au beau fixe. D’où vient-il donc que les voix s’élèvent aujourd’hui pour dénoncer cette pratique ? La question est importante. Tout comme la réponse.

Pour ce qui est de Douala, tout part de la Décision N°025/AM/CUD/CAB-M/2020 fixant les tarifs de la redevance publicitaire dans la ville de Douala du 11 janvier 2021. Les tarifs dont il s’agit ici, il faut le noter, sont fonction des zones de publicités prestige, préférentielle et ordinaire, des espaces que la Mairie de Douala a pris le soin de bien délimiter. En parcourant le document joint dit l’Annexe du tarif du produit de concession des emplacements publicitaires applicables aux dispositifs publicitaires exploités dans la ville de Douala, dans sa partie réservée à l’affichage publicitaire, l’on s’aperçoit que pour un panneau classique (PA) tout comme pour un panneau lumineux (PL), la redevance publicitaire revient à 10 000 Fcfa/m²/face/mois pour ce qui est de la zone de publicité prestige, 8 500 Fcfa/m²/face/mois pour la zone de publicité préférentielle et à 5 000 Fcfa/m²/face/mois en zone de publicité ordinaire. Pour un supersign, il faut prévoir 11 000 Fcfa/m²/face/mois en zone de publicité prestige, 10 000 Fcfa/m²/face/mois en zone de publicité préférentielle et 6 000 Fcfa/m²/face/mois en zone de publicité ordinaire. Concrètement, pour un PA (4x3) par exemple, tout régisseur devrait payer une redevance de 120 000 Fcfa, 102 000 Fcfa et 60 000 Fcfa respectivement pour les zones de publicités prestige, préférentielle et ordinaire. Des montants que les afficheurs trouvent asphyxiants et qui, selon eux, ne facilitent pas la commercialisation de ces espaces publicitaires auprès des annonceurs qui ne savent plus aujourd’hui à quelle entité se vouer en matière d’affichage publicitaire au regard des lettres de mise en garde qu’ils reçoivent de Quantum A&A Sarl. Du coup, les mêmes régisseurs, pour contredire la Mairie de Douala sur la redevance publicitaire, brandissent la loi N°2009/019 du 15 décembre 2009 portant fiscalité locale qui précise en son article 3, alinéa 1 qu’« une collectivité territoriale ne peut percevoir un impôt, une taxe ou une redevance que s’il (elle) est créé (e) par la loi, voté (e) par l’organe délibérant et approuvé (e) par l’autorité compétente. » Et le même article de préciser, alinéa 2, que « les taux de prélèvement des impôts et taxes des collectivités territoriales sont arrêtés par délibération de l’organe délibérant, dans le respect des fourchettes fixées par la loi. » Or, de nos jours, relèvent-ils, ni la loi de finances, ni le code général des impôts, ni la loi de 2009 sur la fiscalité locale, ni même la loi de 2019 sur la décentralisation ne font mention de la redevance publicitaire donnant ainsi lieu à une absence de textes fixant ses modalités de prélèvement. Plus est, parmi les taxes communales, constatent-ils, l’on mentionne exclusivement, en référence à l’affichage publicitaire, les droits sur les permis de bâtir ou d’implanter qui s’élèvent à 1% de la valeur du panneau. C’est donc, selon eux, le seul élément légal que les Mairies de Villes devraient leur exiger au moment d’implanter un panneau à côté du droit de timbre publicitaire qui est désormais de 3% ou 15% et la Tva (19,25%) qui sont automatiquement reversés aux impôts, la taxe sur la publicité ayant été supprimée par la loi de finances pour l’exercice 2013.

Quid du mandat accordé à Quantum A&A Sarl ? Ici, la problématique de la régulation et du contrôle des activités publicitaires est soulevée. Outre le fait que « les opérations d’émission et de recouvrement des taxes communales ne peuvent faire l’objet de concession, sous peine de nullité » et que « les taxes communales sont liquidées et émises par le service d’assiette de la commune », comme le soulignent respectivement les articles 121 et 126 de la loi de 2009 sur la fiscalité locale, « l'Etat assure la régulation du secteur de la publicité et exerce un contrôle sur ses activités publicitaires par le biais du ministre chargé de la publicité, avec le concours du Conseil National de la Publicité », tel que stipulé par l’article 44 de la loi N°2006/018 du 29 décembre 2006 régissant la publicité au Cameroun. Les délégués régionaux et départementaux prêtent d’ailleurs serment pour assurer une parfaite régulation et un meilleur contrôle des activités publicitaires. Seulement, démunis de tout pouvoir coercitif, ces derniers se trouvent limités dans leur action et préfèrent observer la scène à distance, les Mairies de Villes s’étant accrochées sur les panneaux publicitaires. Quantum A&A Sarl ne saurait donc se prévaloir du titre de « régulateur » d’un secteur d’activités organisé par des lois et des textes réglementaires contrairement à ce que d’aucuns pourraient penser. Il y a donc tout lieu de recadrer les différents acteurs de l’affichage publicitaire afin que ce secteur affiche une certaine sérénité. C’est de ça qu’il s’agit !

 

Armand Amougou

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