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Brésil : Dilma Rousseff écartée du pouvoir

55 sénateurs sur 81 ont voté la mise en accusation de l'impopulaire dirigeante de gauche, et 22 contre. Elle sera remplacée dans la journée par son vice-président Michel Temer, qu'elle accuse de coup d'État institutionnel, en attendant le jugement final des sénateurs d'ici 6 mois.

C'est la fin pour Dilma Rouseff: la présidente du Brésil a été suspendue de ses fonctions par le Sénat. Jeudi, 55 sénateurs sur 81 ont voté sa mise en accusation et l'ouverture de son procès en destitution pour maquillage des comptes publics. Seuls 22 sénateurs s'y étaient opposés. Dilma Rousseff sera remplacée dans la journée par son vice-président Michel Temer, qu'elle accuse de coup d'État institutionnel, en attendant le jugement final des sénateurs d'ici les six prochains mois. Son successeur et ex-allié devrait annoncer dès jeudi la composition de son gouvernement.

Ce vote final pourrait intervenir en septembre, entre les Jeux olympiques de Rio de Janeiro (5-21 août) et les élections municipales d'octobre. Au terme de ce procès en destitution, une majorité des 2/3, soit 54 voix sur 81, sera nécessaire pour acter la mise à l'écart définitive de la représentante du Parti des travailleurs (PT), mais la suite du scénario ne devrait pas réserver de surprise. Dans cette hypothèse, Michel Temer, 75 ans, assurerait la présidence jusqu'à la fin de son mandat, le 31 décembre 2018.

Mercredi, une majorité de sénateurs avaient annoncé être favorables à sa suspension et l'ouverture de son procès en destitution. Ils avaient pris à tour de rôle la parole pendant 15 minutes pour défendre ou accabler la présidente, accusée de maquillage de comptes publics. À 8h30 ce matin, heure de Paris, alors que le vote n'était pas encore terminé, 41 sénateurs sur 81 s'étaient prononcés en faveur de son départ, soit la majorité requise.

Maquillage des comptes de la nation

Première femme élue présidente du Brésil en 2010, Dilma Rousseff doit s'exprimer jeudi vers 15 heures (heure de Paris), avant de quitter le palais présidentiel du Planalto à Brasilia. «Une ambiance d'enterrement» régnait à la présidence, où Dilma Rousseff a fait emballer ses effets personnels, a confié dans la journée un collaborateur sous couvert d'anonymat. «L'ambiance est très triste ici», a confirmé une femme travaillant au cabinet de la présidente en entrant dans le bâtiment, sans doute pour la dernière fois. «Beaucoup d'entre nous cherchons un nouvel emploi. Nous ne voulons pas travailler pour le vice-président», a-t-elle ajouté. Suspendue de son mandat, elle devrait séjourner durant son procès à sa résidence officielle de Brasilia, où elle vit avec sa mère.

Dilma Rousseff est accusée d'avoir maquillé les comptes de la nation pour se faire réélire. Dans une curieuse défense, la présidente explique que tous ses prédécesseurs ont fait la même chose. Concrètement, les entreprises publiques ont été sollicitées pour faire des prêts à l'État brésilien afin de minimiser les déficits publics.

La présidente a tout tenté jusqu'au dernier moment pour se maintenir au pouvoir. Elle a réussi à convaincre le président du parlement par intérim, Walder Maranhao, d'annuler la session qui avait décidé le 17 avril à une très large majorité de renvoyer le dossier de destitution au Sénat. Walder Maranhao a remplacé il y a peu le président de l'Assemblée Eduardo Cunha qui a été destitué pour ses liens avec l'énorme scandale de corruption lié au pétrolier national Petrobras.
C'est le plus grand paradoxe de ce qui se passe en ce moment au Brésil: la présidente Dilma Rousseff a été destituée par des députés et des sénateurs qui, aux deux tiers, sont impliqués dans des affaires de corruption au regard desquels les accusations sur lesquelles repose la procédure de destitution de la présidente brésilienne peuvent paraître des péchés véniels.

Dilma Rousseff aura tout tenté pour se maintenir au pouvoir. Très impopulaire, elle a même essayé de récupérer dans son gouvernement son très populaire prédécesseur et mentor, Lula da Silva. Son dernier recours pour empêcher le vote du Sénat a été rejeté par la cour suprême. Elle s'estime victime d'un coup d'État. Cette ex-guérillera, qui a montré un courage extraordinaire face ses juges pendant la dictature militaire, n'a jamais voulu se montrer vaincue. Et même après la décision du Sénat, elle a promis de continuer le combat. «Le dernier jour de mon mandat, c'est le 31 décembre 2018» a-t-elle lancé comme un défi. Pour dénoncer ensuite «les élites (qui) remplacent les coups d'État militaires par des coups d'État parlementaires».

Au plus bas dans les sondages, la présidente Rousseff est rendue responsable par la population brésilienne de la situation économique catastrophique du pays en pleine récession alors qu'il était montré en modèle de pays émergent il y a peu. Dilma Rousseff paie surtout l'absence de réforme du système politique depuis que le Parti des travailleurs est au pouvoir, un système qui favorise les combinaisons politiques, le clientélisme et la corruption. Un mal auquel les élus du PT n'ont pas échappé.

Mercredi soir, à Brasília, devant le Sénat, des affrontements ont opposé les forces de l'ordre aux manifestants pro-Rousseff.

© lefigaro.fr