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Cameroun : Le chemin escarpé de la paix – Par Marie-Claire Nnana

Une visite du chef du gouvernement dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest est toujours en elle-même, un événement, tant les espoirs d’une paix durable et d’un retour à la normale ici sont grands, après quatre longues années rythmées par la guérilla sournoise, puis ostentatoire de la mouvance sécessionniste, les exactions des bandes armées et l’exode des populations.

Malgré la main tendue du président de la République, initiateur du Grand Dialogue national et malgré la présence protectrice des forces de maintien de l’ordre et de défense, avec qui ces renégats jouent au chat et à la souris, en se fondant dans la population dès que les représentants de la loi se rapprochent de leurs terriers…

L’émissaire spécial de Paul Biya, Joseph Dion Ngute, n’en était pas à sa -première visite officielle, loin de là. Mais ce déplacement se situe à un moment crucial : d’un côté, la seconde réunion du Comité de suivi des recommandations du Grand Dialogue national convoquée à Buea, par Dion Ngute, dans l’espoir de palper les premiers fruits du Dialogue et d’évaluer le long chemin qui reste à parcourir ; de l’autre, la montée significative des actes de barbarie et de violence des insurgés, après une amélioration notoire du climat global, qui a favorisé la reprise des activités économiques, le retour progressif des déplacés, et le repeuplement des salles de classe.

Ce double signal, pour contradictoire qu’il soit, ne doit pas décourager ceux qui agissent avec abnégation et loyauté, au nom du président de la République, pour restaurer la paix et la sécurité, et tous ceux nombreux, qui croient que le Cameroun uni et indivisible poursuivra sa marche en avant, après cette pénible parenthèse historique. Rien, pas même les attentats visant des soldats, des écoles, des ecclésiastes, ou des chefs traditionnels, ne doit fléchir leur détermination.

Ces développements malheureux, bien marginaux reconnaissons le, ne prouvent qu’une chose : l’hydre terroriste, acculée dans ses retranchements, pousse de plus en plus loin les limites de l’abjection, tout en sollicitant le soutien des forces du mal à l’extérieur de nos frontières.

C’est la preuve que dans une première phase de leur combat, les sécessionnistes ont échoué à rallier les cœurs des populations de ces deux régions, et que le maillage professionnel du terrain par les forces de maintien de l’ordre et de défense les confine à quelques actions d’éclat sporadiques.

En changeant de tactique, pour se muer en une prétendue internationale du crime, ils envoient un message clair que Yaoundé a bien capté. Les visites sur le terrain, à quelques heures d’intervalle du ministre délégué ‘ à la présidence de la République chargé de la Défense, et celle du

Premier Ministre, chef du gouvernement, se passent de tout commentaire. Elles signifient de la manière la plus ferme que le Cameroun ne peut pas accepter de devenir un laboratoire d’expérimentation pour une coalition hétéroclite d’insurgés de tous horizons.

Cela dit, pour faire définitivement échec à cette entreprise nihiliste, construite sur un projet sans aucun  avenir, le Cameroun doit travailler consciencieusement sur trois fronts au moins : l’union sacrée de la classe politique, l’adhésion des populations concernées et leur collaboration tous azimuts et la diplomatie.

L’union sacrée contre la partition du Cameroun nous paraît à la vérité comme le préalable à toute action politique, diplomatique et militaire d’envergure. Les voix discordantes affaiblissent considérablement l’autorité et la légitimité de l’État dans son entreprise de disqualification de la vision et de l’action séparatistes.

Les partis politiques, les hommes politiques, les élites, dirigeantes ou non, les associations religieuses et civiles, les lobbys économiques, en un mot, toutes les forces vives sont-elles convaincues du bien-fondé du dialogue avec les populations concernées, dont l’État doit améliorer le standard de vie et accorder de substantiels pouvoirs dans le cadre de la loi sur la Décentralisation ?

Parlent-ils assez fort et agissent-ils assez vite pour que la décentralisation voulue par le chef de l’État soit effective, et vienne, du fait de son efficacité même, affaiblir et délégitimer toute velléité de déstabilisation du pays basée sur la « doctrine sécessionniste » ?

L’honnêteté intellectuelle commande d’affirmer ici que les Camerounais peuvent mieux faire pour démontrer leur parfaite cohésion dans ce registre. Il n’est pas rare de relever des voix discordantes, voire des freins et des actions dilatoires, à : l’intérieur même du système.

Ne nous y trompons pas : « c’est l’affaire de tous les Camerounais », comme l’a plaidé le chef du gouvernement à Buéa. Les leaders d’opinion en particulier doivent monter au créneau, à l’exemple de Christian Cardinal Tumi de regrettée mémoire. A la fin de sa vie, il ne craignait pas I de déclarer : « Je ne veux plus entendre parler d’Ambazonie ! »

L’adhésion et la collaboration des populations sont l’autre pan de cette croisade. On ne peut raisonnablement vouloir sauver des populations de la violence sécessionniste sans les imbriquer étroitement dans la réflexion stratégique. Et cela commence par une communication efficace sur la finalité des actions menées, et le décompte exhaustif de celles-ci.

Or, beaucoup l’ont reconnu à Buéa : ils ne sont pas informés des jalons significatifs et décisifs déjà posés pour le retour à la vie normale et l’amélioration de leur sort. Le plan présidentiel de reconstruction, les avancées du Code général des collectivités territoriales décentralisées avec le Statut spécial, la spécificité reconnue aux systèmes éducatif et juridique, avec le Common Law ; la Nasla, etc. Sans aucun doute, le gouvernement améliorera-t-il

son mode de communication en direction des populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, en prenant en compte des relais communautaires plus efficaces du fait d’un meilleur ancrage socio-culturel.

Pourtant, il est primordial de faire comprendre à nos compatriotes de ces deux régions que leur propre volonté d’en finir avec la terreur sécessionniste est primordiale pour le succès final, au moins autant que l’action de la puissance publique. Cette volonté devrait se traduire par une meilleure collaboration, des échanges d’information avec les représentants de l’État Ernest Sâbato, écrivain argentin, écrivait en 1961, dans son ouvrage Alejandra :

« Ce ne sont pas les idées qui sauvent le monde, ni l’intelligence, ni la raison, mais leur contraire radical, ces actes insensés, dépourvus de toute logique, cette persistance enragée des hommes à vouloir survivre, leur ardent désir de respirer tant que ce sera possible, leur petit héroïsme de tous les jours, tenace et ridicule, face au malheur. » En d’autres termes, notre destin est toujours, d’une certaine façon, entre nos mains.

Enfin, notre pays doit poursuivre une communication étroite avec tous ses partenaires, pour mieux expliquer sa vision, et les tenants de sa riposte face à cette crise politique et sécuritaire qui chamboule la vie des populations et détruit l’économie.

En effet, devant la violence sanguinaire des sécessionnistes, la riposte des forces de maintien de l’ordre et de défense subit toujours la critique acerbe de certaines ONG, et même de lobbys parlementaires de pays amis, sur le thème du non-respect des droits humains.

Or, la stabilité même de  l’État dépend de sa capacité à faire régner l’ordre et la paix, partout dans le territoire, certes dans le strict respect de l’État de droit. Or, si l’État est tétanisé par la peur d’être regardé comme un bourreau des droits de l’Homme, ne risque-t-il pas de se complaire dans une posture attentiste que les terroristes ont tôt fait d’assimiler à de la faiblesse, pire à de l’impuissance ?

Nous pensons qu’il est crucial pour le Cameroun d’agir dan§ le sens de son intérêt, mais de ne pas se fatiguer de dialoguer avec ses partenaires au développement, en expliquant ses points de vue, notamment le devoir de protéger les populations et l’intégrité du territoire. Demander leur coopération pour neutraliser les financiers et donneurs d’ordre basés dans leurs pays. Et refuser de devenir des bases arrières des sécessionnistes.

Une chose est certaine : face aux barbares, la fuite et l’inertie ne sont pas une option. Victor Duruy, historien et homme politique français, écrivait dans la préface de l’Histoire de France : « La civilisation ne marche pas en ligne droite, elle a des temps d’arrêt et des reculs qui feraient désespérer, si l’on ne savait pas que la vie de l’Humanité est un long voyage sur une route difficile, où l’éternel voyageur monte et redescend, en avançant toujours. »

Ainsi donc, le président de la République continuera à combattre cette rébellion armée, à protéger les populations et à améliorer leurs conditions de vie, avec toutes les bonnes volontés, comme il l’a fait hier à Bakassi, comme il continue de le faire dans le Septentrion, dans le but de bouter les extrémistes de Boko Haram hors de nos frontières.

C’est aussi cela, la vie des nations et des hommes d’État : vaincre les périls, et continuer à écrire l’Histoire.

Cameroon Tribune