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Opinion : «Le problème du football camerounais, ce n'est pas Eto'o, encore moins ceux qui le critiquent »

Dans son essai, Franck Ghislain Onguene interpelle les Camerounais sur la situation du football national, en les exhortant à dépasser les critiques superficielles souvent exprimées sur les réseaux sociaux.

Ci-dessous la publication de Franck Ghislain Onguene Spécialiste en Économie et en gouvernance internationale du sport.

POUR "LA GRANDEUR" DE NOTRE FOOTBALL, VOUS DEVEZ ARRÊTER D'ÊTRE LES "BABANA" DES RÉSEAUX SOCIAUX

Le Cameroun est malheureusement l'un des rares pays au monde où un médecin épidémiologiste, qui pratique depuis des décennies, peut faire une publication sur le séquençage, la morbidité, et la variabilité du nouveau virus M-Pox, ainsi que sur son désaccord avec le président de l'Ordre des médecins concernant la stratégie de riposte nationale. Et pourtant, vous verrez un mototaximan (Babana) garer son "benskin", prendre son téléphone "tchoronko", et commenter la publication en affirmant qu'il n'est pas d'accord, pour finir en traitant le médecin épidémiologiste de "hiboux". Pourtant, il n'a absolument aucune connaissance du sujet, encore moins de l'expérience de l'auteur de ce post.

Cher Camerounais, cher Africain, ce texte sera un peu long, mais crois-moi, je te conseille de le lire jusqu'à la fin, car il changera RADICALEMENT et à jamais l'image et la perception que tu as de la gestion du football au Cameroun.

*DE QUELLE PATHOLOGIE, ÉPIDÉMIE, VIRUS, SOUFFRE RÉELLEMENT LE FOOTBALL CAMEROUNAIS ?*

🚨Spoiler alert : le problème du football camerounais, ce n'est pas Eto'o, encore moins ceux qui le critiquent.

Ce que vit l'épidémiologiste dans mon premier paragraphe, c'est exactement ce que le football camerounais connaît depuis 1998, année marquée par l'incarcération de Vincent Onana et l'arrivée d'Iya Mohamed à la tête de l'instance faîtière du football. Beaucoup de personnes dans les médias et plus tard sur les réseaux sociaux parlent de ce qu'elles ne maîtrisent pas du tout. Elles ne vont jamais au stade, n'ont jamais acheté un gadget d'un club camerounais, ne savent même pas où se trouve la FECAFOOT, ne connaissent même pas trois joueurs évoluant dans le championnat... Mais commentent et disent qu'elles ont voté pour Eto'o et le soutiennent...

Qu'on soit bien clair, il faut faire une PROFONDE différence entre le football et la gouvernance du football.

Le football est juste un divertissement, un jeu dont les règles sont édictées en permanence non pas par la FIFA, comme beaucoup pourraient le penser, mais plutôt par une institution totalement indépendante (et ce n'est pas un hasard), appelée l'IFAB (INTERNATIONAL FOOTBALL ASSOCIATION BOARD). La gouvernance (gestion du football), c'est un tout autre domaine qui n'a absolument rien à voir avec le divertissement et le jeu. Elle est pilotée par la FIFA, qui réunit un ensemble de personnes autour d'une vision et qui travaillent jour et nuit pour que le jeu évoqué plus haut contribue à l'épanouissement de ceux qui le pratiquent ainsi qu'à leurs familles. Il s'agit donc pour tout gestionnaire du football international de comprendre que la survie de centaines de millions de personnes dans le monde, qui ne vivent que de ce jeu et de ce divertissement, dépend de lui. Au Cameroun, la survie de centaines de milliers de personnes qui ont consacré leur vie au football dépend des gestionnaires du football camerounais. De la même manière que des centaines de milliers de vies dépendent de l'épidémiologiste. S'il se trompe dans le séquençage du virus qui cause l'épidémie, et si le président de l'Ordre National des Médecins se trompe sur la stratégie de riposte, de nombreuses personnes perdront la vie.

En d'autres termes, la gouvernance du sport est un écosystème très complexe où tout le monde doit s'appliquer efficacement afin de sauver des carrières sportives et des familles entières. Être président de la FECAFOOT ou d'un club de football n'est donc pas un jeu !

**QUELS SONT DONC LES EFFORTS CONSENTIS POUR AVOIR DES GESTIONNAIRES DU FOOTBALL EFFICACES AU CAMEROUN ?**

Personnellement, je pense que si quelque chose a été fait, beaucoup reste encore à faire. À ce jour, il n'existe pas, à proprement parler, d'institutions de renom qui forment des gestionnaires du football camerounais dans le cadre d'un cursus académique ou même d'un programme exécutif. Cela explique, selon moi, les nombreux manquements que nous constatons dans notre métier. En effet, avant les années 90 et la survenue des lois portant sur la liberté d'association, le président de la FECAFOOT était nommé par le gouvernement et, généralement, il s'agissait d'un cadre formé dans les meilleures écoles d'administration du Cameroun et d'ailleurs. Ses collaborateurs l'étaient également pour la plupart. Je ne dis pas qu'à ce moment tout était parfait, mais on avait néanmoins une certaine lisibilité, une certaine vision, et aussi logique que cela puisse paraître, les résultats suivaient tant en compétition interclubs qu'en compétition internationale avec les Lions Indomptables. Le dernier gestionnaire de la FECAFOOT avec ce type de profil était Iya Mohamed. Nous avons cependant des structures telles que le CNOSC ou même l'ISEP-FM de Françoise Mbango qui essayent de former de leur mieux des managers du sport. Et puis, nous avons aussi des autodidactes qui, de par leur démarche empirique et leur expérience du terrain, ont essayé tant en club qu'à la FECAFOOT d'apporter de la créativité, de l'innovation, et surtout des résultats.

**LE MOI EST HAÏSSABLE, MAIS LAISSEZ-MOI VOUS RACONTER BRIÈVEMENT MON PARCOURS DE COMBATTANT DANS LA GESTION DU FOOT !**

Après avoir obtenu une licence professionnelle et un master professionnel, respectivement dans la meilleure école de communication d'Afrique francophone (ESSTIC) et dans la meilleure école de diplomatie et de relations internationales d'Afrique (IRIC), j'aurais pu me consacrer tranquillement à une carrière dans l'administration publique ou même dans des firmes privées. J'ai décidé de faire don de mon cerveau et de mon corps à ma passion, le football.

J'ai donc pris la décision de partir en Égypte à mes risques et périls, sans grand moyen. Je me souviens que ma mère avait vendu sa voiture pour que je puisse m'acheter le billet d'avion ; la CAF n'avait même pas encore validé mon stage de perfectionnement et, de toute façon, elle n'avait jamais validé ce genre de stage depuis 1957. J'ai néanmoins pris le risque, et une fois au Caire, j'ai rencontré et partagé ma vision avec le secrétaire général de la CAF d'alors, @Hicham El Amrani un Marocain qui m'a fait confiance et m'a recommandé à Issa HAYATOU, alors président de la CAF (que son âme repose en paix), qui a également cru en moi et a finalement validé le stage. Mon séjour à la CAF m'a permis de cerner tous les enjeux liés aux problématiques globales dont souffre le football africain. Je me suis également formé dans le cadre de nombreux séminaires et colloques, grâce à mon grand frère Junior Binyam , qui veillait toujours à inscrire mon nom à chaque opportunité de renforcement des capacités.

De retour au Cameroun, j'ai mis sur pied une agence spécialisée dans le marketing du sport. Lorsqu'on m'invitait dans les médias, j'étais assez critique vis-à-vis du championnat camerounais et de la ligue de football professionnel d'alors. Un jour, le secrétaire général de la Ligue, Benjamin Beyeck a fait appel à trois promoteurs d'agences de marketing de sport : dont moi, Pierre "Tatou" Toukoulou et Yannick Ndegue . Il nous a dit ceci : "Vous critiquez tout le temps la Ligue dans les médias, pensez-vous pouvoir faire mieux ?" À l'unanimité, nous avons répondu "OUI". Il nous a dit : "Faites donc !" Un mois plus tard, mes deux amis, qui sont aujourd'hui mes frères, et moi organisions les PREMIERS PLAY-OFFS DE L'HISTOIRE DU FOOTBALL PROFESSIONNEL CAMEROUNAIS : quatre mini-tournois en simultané entre Yaoundé et Limbé. À Yaoundé, le ministère nous avait refusé le stade Omnisports, on s'est rabattu sur le stade Militaire et le stade Annexe. En deux semaines, nous avons généré plus de 40 millions de FCFA grâce à la billetterie et au sponsoring. Notre stratégie pour ramener les gens aux stades était simple : un ticket acheté = une boisson offerte, des activités attractives, des concours, des jeux vidéo, et des spectacles avant chaque match. Les fans de foot ramenaient leurs familles par centaines. Au début du projet, nous sommes allés voir les Brasseries du Cameroun qui nous ont dit que jamais ce projet ne pourrait être réalisé. Au bout de deux semaines, nous avions écoulé 28 000 boissons ; aucun bar dans la ville de Yaoundé ne pourrait réaliser un tel chiffre même en trois ans. Les Brasseries étaient tellement stupéfaites que l'entreprise était prête à nous suivre Pour l'organisation du Championnat l'année suivante. Malheureusement, la Ligue fut suspendue par la FECAFOOT au lendemain de cette performance historique.

Loin de me décourager, j'ai fait la rencontre d'un jeune président de club, Bouelle Silas Elvis un homme incroyable et passionné qui présidait un petit club de football dans la petite ville côtière de Kribi. Très peu de personnes savaient qu'on jouait au foot dans cette ville connue pour son attrait touristique. J'ai formé une équipe de choc avec mes frères André Onana Onana et Bernard Bassong . On est arrivés à Kribi, on a formé des dizaines de jeunes sur place dans les techniques de marketing du sport et dans la collecte des données statistiques. On a restructuré le marketing et la communication du club ; en quelques mois, on avait des sponsors importants, l'appui des autorités de la ville, un équipementier belge démarché grâce à mon ami Jean Jacques Tsoungui En plus, on était présents sur toutes les plateformes, et les médias venaient de partout pour parler du petit club de l'Océan. Les joueurs de l'OFTA de Kribi étaient devenus des célébrités dans toute la ville. Tous les Kribiens ne parlaient que de ce petit club, et très vite, sur le plan national, tout le monde voulait être comme OFTA. Finalement, le club est monté en première division avant de redescendre quelques saisons après. Malheureusement, avec OFTA, nous avions restructuré la façade, mais pas l'essentiel : le management. Nous avions un excellent marketing, mais une mauvaise gouvernance, et en football, cela se paie souvent cash.

Après mon expérience à Kribi, qui était aussi pour moi un apprentissage, je suis revenu à Yaoundé. Et par l'entremise de Pinon Omgba J'ai été convoqué par le président du CANON de YAOUNDÉ qui venait d'être élu. Je suis allé à son bureau, on a discuté cinq minutes, j'ai fermé la porte de son bureau à clé, j'ai fermé les yeux, et je lui ai demandé de me parler de sa vision de la gestion du football. Quand j'ai ouvert les yeux, je lui ai dit que je pouvais réaliser sa vision, mais à une condition : que le management et la gestion sportive du Canon soient restructurés avant toute autre chose. J'avais une très bonne expérience du management au vu de ce qui précède, mais je n'avais pas 100% du savoir-faire nécessaire pour réécrire tous les processus administratifs et financiers d'un club de 90 ans d'existence. Au lieu de jouer le "babana" qui sur son "benskin" connaît tout, je suis allé à Douala dénicher un talent qui revenait de France et dont j'avais fait la connaissance lorsque j'étais à OFTA : Martin Jonathan Ekwalla . Il était brillant dans la rédaction des projets et moi impeccable dans la réalisation. Je l'ai présenté au président du Canon, le courant est passé, nous sommes rentrés en conclave tous les trois. Quelques jours après, le projet "KPAKUM IS BACK" avait vu le jour. Nous avons repensé tous les trois la dynamique du Canon sous cinq angles : LA STRUCTURATION, L'INFRASTRUCTURATION, LA FORMATION, LE MARKETING ET L'ACTION COMMERCIALE, et enfin L'INTERNATIONALISATION ET LA RECHERCHE DES PARTENAIRES FINANCIERS. En une semaine, j'avais trouvé un local à Anguissa qui deviendrait plus tard le siège. Jonathan et moi avons pensé le design de celui-ci, on y a conçu des postes de travail, une salle de musculation, une salle de conférence, une mini-infirmerie, un espace de relaxation, une intendance, des open spaces, et surtout LA PREMIÈRE BOUTIQUE MODERNE D'UN CLUB DE FOOTBALL CAMEROUNAIS. On a formé pendant des semaines tout le personnel recruté, on leur a inculqué la vision et les challenges. Personnellement, j'ai mis sur pied une équipe dynamique d'une quinzaine de jeunes qui, pour la plupart, n'avaient jamais fait de marketing et de communication du sport auparavant. D'ailleurs, aujourd'hui, l'un d'entre eux, Vannick a été recruté par l'Olympique Lyonnais en France pour gerer son marketing digital.

Ayant donc assis toutes les bases de gouvernance, on a lancé le projet ! KPAKUM IS BACK est de très loin l'un des projets les plus ambitieux de ma vie, mais aussi du football camerounais. Au bout de deux saisons, le Canon tutoyait les sommets du football mondial en termes de marketing et de communication. Des médias venaient de par le monde pour comprendre ce qui se passait. Canal+ nous a consacré plusieurs émissions, la télévision nationale chinoise en a fait de même. Nous avions obtenu le BALLON D'OR Camerounais du club le plus professionnel par la Fecafoot - Officiel . Nous avions conclu une bonne dizaine de partenariats nationaux et internationaux au terme d'une présentation de notre projet devant le patronat camerounais ( GICAM ). Je suis allé personnellement jusqu'en Italie pour finaliser le partenariat avec Macron   un équipementier, 4ème au monde, qui compte entre autres comme clients l'UEFA, la Liga Espagnole, etc. Ça a été un moment inoubliable pour les fans du Canon.

J'ai par la suite été sollicité comme consultant marketing pour l'organisation du CHAN en 2021 et j'ai été nommé par le ministre des Sports avec 9 autres personnes, dont mon frère Pierre Toukoulou pour structurer le Marketing et l'offre commerciale de la CAN 2021 au Cameroun dans le cadre de la commission Marketing Nationale du COCAN. Pendant la CAN, j'ai découvert que j'avais encore de nombreuses lacunes sur le plan de la gouvernance internationale du sport, alors j'ai postulé pour un programme exécutif en gouvernance et en économie du sport aux États-Unis. J'ai dû malheureusement renoncer TEMPORAIREMENT au Canon afin de revenir plus fort, plus tard.

Aujourd'hui, je travaille avec la fédération américaine dans le cadre d'un projet de pont entre l'Afrique et l'Amérique du Nord. Parlant parfaitement les 3 langues officielles des 3 prochains pays co-organisateurs de la Coupe du Monde 2026, mon rôle dans la bonne marche de la connexion Afrique-Amérique sera fondamental.

**Que retenir de ce très long "AUTO-ATALAKOU" ?**

La gouvernance du football n'est pas un jeu encore moins une discipline qui consiste à traiter les gens d' "églisiens" ou de "hiboux" !!!

Dans le cadre du projet KPAKUM IS BACK, ce sont 75 FAMILLES qui, chaque fin du mois, attendaient du club de quoi survivre. Peu importent les résultats du jeu sur le terrain, mais ce que nous réalisions comme performances financières et managériales n'était possible que grâce aux supporters qui y mettaient du leur : achetaient les maillots et les produits dérivés, payaient les tickets d'entrée au stade, se connectaient par milliers sur le live Facebook à chaque match, finançaient parfois les déplacements et l'accommodation de l'équipe lors des matchs à l'extérieur. Ces chiffres nous permettaient de convaincre les sponsors et les partenaires.

La meilleure façon de soutenir Eto'o, ce n'est pas de créer un faux profil sur Facebook, de garer son benskin et d'insulter les gens en longueur de journée. Même à l'église (pour ceux qui se disent "églisiens"), on collecte de l'argent pour faire vivre l'église et les bénévoles qui y travaillent.

Eto'o doit accepter les critiques et savoir s'entourer. Tout au long de mon récit, j'ai nommément cité ceux sans qui rien n'aurait été possible. Un bon manager doit avoir la vista dans le choix de ses collaborateurs et de ses amis. L'échec ne doit pas être un motif de découragement. L'histoire que je vous ai racontée n'est pas faite que de succès, mais aussi d'échecs qui m'ont permis de m'ajuster et de m'améliorer, d'identifier mes lacunes et de les corriger. Sans OFTA de Kribi, je n'aurais jamais réussi le projet KPAKUM IS BACK. Oui, je sais, beaucoup vont dire que les résultats sportifs ne suivent pas, oubliant que le club n'est remonté en Elite One qu'il y a moins de 5 ans, et depuis le début du projet, le CANON ne joue que les premiers rôles. Un projet sportif nécessite parfois de la patience, de la détermination et de la résilience (cf. PSG, MAN CITY, CHELSEA, etc.). Samuel Eto'o doit le comprendre et arrêter de se mettre inutilement la pression avec des projets farfelus du genre "ON VA GAGNER LA COUPE DU MONDE" ou même en organisant le championnat professionnel. Ce n'est pas son rôle, et personne ne lui a jamais demandé de le faire !

Et vous, chers soutiens d'Eto'o, la meilleure façon de l'aider à faire taire les critiques, c'est de venir à chaque match des championnats amateurs et professionnels au stade, de soutenir financièrement et matériellement un ou deux clubs de votre choix, de vous intéresser aux acteurs et non aux présidents, d'accompagner les joueurs dans la réalisation de leurs rêves. J'ai d'ailleurs participé à la mise sur pied du projet NSF de mon ami et homonyme @Ghislain Etsil (Secrétaire Général des services du Gouverneur du Centre). NSF est une plateforme qui vous permet de financer votre club de football camerounais favori toute la saison à travers le code téléphonique *10#.

Si vous n'avez jamais rien fait de tout ce qui précède, alors vous n'êtes ni un supporter, ni un "Églisien", vous êtes juste un "babana" qui a garé sa moto pour insulter les gens sur Facebook