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Cameroun-Opération Epervier : Urbain Olanguena Owono ouvre le procès de la justice

Urbain Olanguena Owono

L’ancien ministre de la Santé, incarcéré à la prison de Kondengui, a publié, l’année dernière, un livre sur les procès politiques de l’Opération épervier et les rôles de Mebe Ngo’o, Ze Meka, Laurent Esso, Issa Tchiroma, Amadou Ali, etc.

L’ancien ministre de la Santé retrace dans son ouvrage de 456 pages le souvenir des moments douloureux de cette mise à mort médiatique, dont le sommet est la caméra cachée réalisée par la Crtv dans la cellule de la direction de la police judiciaire, avec les images de «ma personne couchée à même le sol sur un matelas dans une cellule infecte ». « J’ai vécu douloureusement cette humiliation avec ma famille et mes amis… Traiter un ancien ministre de plusieurs gouvernements comme un vulgaire et horrible braqueur », s’indigne l’auteur. Cette charge est une petite mise en bouche de « Mensonges d’État : déserts de République au Cameroun » commis par Urbain Olanguena Awono aux Editions du Schabel. 

Entre autres, «l'ironie de l'histoire», «l'héritage d'un secteur sinistré», «l'enjeu, l'interdit de la succession», «dix chefs d'accusation», «juge d'instruction ou commissaire politique ?», «vérité d'un martyr», «Non-coupable, le verdict bloqué», «L'impératif de l’État de droit»,... sont les titres de quelques-uns des 24 chapitres regroupés dans cinq grandes parties aux titres fort éloquents comme «Le temps de l'action», «la purge», «un procès absurde», «condamné pour rien : le déni du droit et l'arbitraire judiciaire»,...

Dans un style relevé qu’on avait déjà apprécié dans « Sida en terre d’Afrique », son dernier livre (Editions Privat). Le pensionnaire de Kondengui, qui purge une double peine de 15 et de 20 ans de prison, infligée en l’espace de deux mois, décrit, selon les mots de son avocat français, Me Richard Sedillot, préfacier de l’ouvrage, un exemple remarquable de ce type d’instrumentalisation et de manipulation politique de la justice, à l’occasion des manœuvres communément dénommées au Cameroun, « Opération Epervier.»

Manoeuvre.

Cette thèse est reprise par l’auteur dans le livre. Urbain Olanguena Awono raconte que pour son cas précis, tout est parti du G11. Une nébuleuse dont il dit ne rien savoir, qui n’existe même pas, mais qui a été créée par des officines tapies au sein des renseignements généraux de la police et du ministère de la Défense ayant juré sa perte, ainsi que celles de Polycarpe Abah Abah et de Jean Marie Atangana Mebara. A la manœuvre de ce projet, l’ancien Minsanté voit Edgar Alain Mebe Ngo’o, cidevant directeur du cabinet civil à la présidence de la République et Dgsn au moment des faits, et Rémy Ze Meka, ministre de la Défense.

« Les écuries de ces deux hommes, originaires de Zoétélé, département du Dja et Lobo, Région du Sud, et donc très proches des origines du chef de l’État, ont inventé et popularisé l’histoire du G11 », écrit Urbain Olanguena Awono. Le G11 a, d’après le récit de l’auteur, été présenté à Paul Biya comme une conspiration politique en vue de le renverser. La révélation de l’ouvrage, c’est que les émeutes de février 2008 sont considérés comme une « insurrection instrumentée par des élites politiques en mal de pouvoir », c’est-à-dire le G11, ce « machin ». On comprend pourquoi Paul Biya qualifiera les présumés tireurs de ficelle d’apprentis-sorciers, après avoir sorti des chars autour d’Étoudi pour sa protection.

Comme il n’y a pas de hasard, le 19 mars 2008, sur ordre de Mebe Ngo’o, les passeports de Olanguena Awono et de Abah Abah leur sont retirés. Une douzaine de jours plus tard, ils sont arrêtés. Ils seront conduits à Kondengui sous escorte, avec motards et gyrophares. Urbain Olanguena Awono est persuadé qu’ils sont victimes de leur compétence, dans un marigot de médiocrité. « Avec l’enjeu de la succession, et la raison d’État d’éliminer ceux à qui on prête des ambitions, le mensonge s’est installé au cœur de l’État », écrit l’auteur. Qui pense que dans ce scénario, Paul Biya, qui croit tenir les rênes, n’est peut-être lui-même qu’une victime de la manipulation. Et Urbain Olanguena de s’interroger: « peut-il comprendre que ceux qui tirent les ficelles s’évertuent à le présenter comme l’organisateur direct du chaos généralisé d’une épuration dont on distingue mal le projet ? »

L’ancien Minsanté dissèque par ailleurs les dix accusations préalablement portées contre lui, pour un montant initial de 8,5 milliards, qui passera à 474 millions pour que le procès ne porte que sur 92 millions de Fcfa. Une preuve, selon lui, de la légèreté des enquêtes, du vide de l’accusation et de son innocence finale, qu’il proclame tout le long du livre. L’ancien Minsanté est conforté par le rapport des experts judiciaires qui avaient conclu à une absence de malversation financière et par un communiqué du Fonds mondial de lutte contre le Sida, le paludisme et la tuberculose, qui avait déclaré n’avoir rien à reprocher à la gestion des financements mis à disposition du Cameroun et mouvementés par Urbain Olanguena Awono.

Trois ans et demi déjà après son incarcération, l’ancien ministre avait publié un document : Ma vérité au peuple et aux partenaires du Cameroun au sujet de l’opération épervier. Il conclue sa correspondance ainsi : « Pour cela, je crois très sincèrement, cela vaut pour tous, que la sagesse tirée de la sentence latine «Errare humanum est, perseverare diabolicum est» (c’est-à-dire «l’erreur est humaine, c’est y persévérer qui est diabolique») est une formidable source d’inspiration. Il est temps. »

 

© InfoMatin